Parmis les effets incontrôlables de la saison, une petite boule de chaleur demeure (profonde à l’intérieur de moi). Je tente de la pousser, l’expirant dans l’air qui m’entoure. Souffle devenant force. Mes actions solitaires laissent des traces qui sont altérées, cassées ou disparues. Un homme m’arrête pendant que je gèle un large cube de glace sur un banc; il essaye de comprendre les saisons. Je dépasse un groupe réuni autour d’une impression de ma main dans la glace; deux jours plus tard celle-ci est en plusieurs morceaux. Un petit enfant serre un bloc de glace dans ses bras, les deux sont de la même grandeur; après quelques heures, le bloc de glace n’existe plus. Je dors sur un banc, lentement enfouie sous la neige qui tombe; des gens marchent, inconscient de ma présence.

Depuis Janvier, Rachel Echenberg s’engage dans un processus qui place la chaleur de son corps contre le froid de l’hiver. Cette série incorpore des objets et des actions avec les aspects incontournables du climat. Des blocs de glace “home-made”, certains ayant des formes du corps fondues à même leur surface, ont été laissés de façon anonyme tard le soir à des arrêts d’autobus et des stations de métro. Cette infiltration continuelle a été ponctuée d’actions performatives: rester figée durant de longue période de temps au milieu d’une tempête de neige, faire fondre des boules de neige dans sa bouche, traîner et dormir sur des blocs de glace, s’enneiger dans des cocons. Tous ces moments isolés s’intégrant au continuum du travail de l’artiste représentent un processus d’expérimentation qui réagissait aux éléments tandis qu’elle les rencontrait.

Le 22 mars, Rachel Echenberg concluera ce processus avec une performance-présentation en galerie. Cet événement rassemblera les grandes lignes du projet et incluera une présentation de la documentation des actions extérieures.

FONDRE : une série de sensations hivernales
En introduisant une présence intimiste dans un lieu urbain anonyme, les performances de Rachel Echenberg contribuent à révéler l’état de vulnérabilité physique de l’individu dans l’espace urbain. Dans ce projet de trois mois qui vise à problématiser la pérennité de l’oeuvre d’art et la fugacité d’une action, elle fait interagir le froid de l’hiver et la chaleur du corps humain. Elle exécutera ainsi une série de sculptures de glace et les déposera ensuite dans différents lieux dans la ville. Cette activité sera ponctuée par des performances publiques spontanées qui voudront explorer la perception que l’on a de l’écoulement du temps dans la ville, en problématisant les contraintes physiques de la vie urbaine face au froid. Ce projet se concluera par une performance à La Centrale qui reprendra les éléments essentiels des actions et des interventions effectuées pendant les trois mois du projet.

Biographie
Rachel Echenberg est une artiste performeuse et multidisciplinaire de Montréal. Elle a participé à des résidences d’artistes et à des ateliers au Québec et aux Etats-Unis, et elle fait partie du collectif de performances Play Group. Depuis 1992, son travail en performance et en vidéo a été présenté dans des expositions, des symposium et des festivals d’art au Canada, en Suisse, en France, en Pologne, en Italie et au Japon. Récemment, elle a été conservatrice invitée pour un événement de la 5e édition du Mois de la performance à la Centrale, en décembre 2002.