En se souvenant des rues labyrinthiques et étroites de Fès au Maroc débouchant souvent sur des portails de mosaïques magnifiques, Aïcha Raihani a choisi d’investir l’idée du mur afin d’aborder la question d’identité ainsi que du passage d’une culture à une autre. Son installation, DIS_CURSUS, comprend un mur portail composé de deux cent vingt-deux tuiles de céramique, qui par son ornement attire le regard et suscite le désir de s’approcher. Les mosaïques, un subtil agencement de motifs d’armes et de munitions, forment un ensemble où l’origine du motif est noyée dans la masse, où la séduction côtoie la violence et le non-dit, où les balles peuvent aussi se confondre avec des capsules de rouge à lèvres.

En franchissant l’ouverture du mur, tel le passage de la rue à l’intimité de la maison, on entre dans une pièce peu éclairée, envahie par la couleur et l’odeur du henné appliqué en grande quantité sur le mur arrière. Avec l’utilisation du henné, répandu surtout en Afrique, en Asie du sud, mais devenu familier en occident aussi, Aïcha Raihani fait non seulement allusion à un univers féminin, au tatouage et aux bains hammam où les femmes se teignent les cheveux, mais aussi à sa fonction symbolique de protection lors de certains rites de passage.

La création d’une division d’espace repose sur les préoccupations de l’artiste s’articulant autour des notions de séparation, d’exil et de communication coupée et met en évidence la double incidence psychologique du mur : la sécurité et la défense d’un côté, l’étouffement et la prison de l’autre.

Aïcha Raihani, d’origine Suisse, vit et travaille actuellement à Montréal. Diplômée de l’École Supérieure d’Art Visuel à Genève, elle a réalisé plusieurs films d’animation et a participé à des expositions de groupe à Genève et à Montréal, dont l’exposition, Post-audio esthetic, à la galerie Clark en 2000. DIS_CURSUS est sa première exposition individuelle.